Yanis Khames a grandi à Saint-Denis. Investi dans ce territoire et son tissu associatif, il est porteur avec Luca Poissonet d’un projet de tiers lieu qui s’est vu décerner le prix de l’utilité socialedes Trophées Lumières de l’incubateur I-Engage Paris 8 Saint-Denis du PosteSource (CNIS). Il relate la genèse du Café à L’Asso, tiers-lieu à l’intersection entre un centre socioculturel et un café classique qui se conçoit comme l’articulation entre l’Université et le quartier.
Yanis Khames a 23 ans, le regard franc, et dégage une assurance décontractée. Son discours est structuré. Étudiant en master 2 de politique transnationale et mondialisation, il a auparavant été diplômé d’une double licence d’histoire et de science politique à Paris 8. Assistant d’éducation au collège Elsa Triolet de Saint-Denis, habitant depuis toujours sur la commune, il témoigne de son attachement à un territoire passionnant, souvent caricaturé et méprisé. Ce sentiment d’injustice et l’envie de lutter contre les clichés l’ont incité à fonder l’association Saint-Denis Ville au Cœur, qu’il nous décrit comme ouverte à tous et à toutes et dont l’objectif principal est « de stimuler la cohésion sociale en créant une communauté engagée en Seine-Saint-Denis pour répondre aux problèmes qui se posent à nous en tant qu’habitants et habitantes du territoire ». Pour ce faire, Saint-Denis Ville au Cœur propose des actions de sensibilisation, de l’accompagnement de projets engagés, de l’évènementiel à destination de cette communauté investie et à but militant, pour revendiquer des moyens et pallier les manques des habitants.
Inclusion, partage et rencontre sont au centre de l’activité de Saint-Denis Ville au Cœur. Lutter contre les représentations clichées des quartiers populaires est aussi un enjeu fondamental. L’association est à l’origine de la marche des fiertés de banlieue, pour lutter contre l’idée que les quartiers populaires seraient davantage sujets aux préjugés sur la communauté LGBTQI+ résidant dans ces quartiers, et pour visibiliser cette communauté.
Parmi ces manques, il y a aussi celui, pour le quartier Allende à côté duquel s’élève l’Université, de lieux de convivialité, d’échange et d’animation, qui puissent favoriser le lien social. Yanis a grandi à Saint-Denis, et connaît depuis l’enfance le quartier Allende : « On est dans un quartier prioritaire, dans lequel se situe une université qui a 23 000 étudiants, et ce potentiel n’est pas du tout exploité. » Créer de l’attractivité et faire se rencontrer les gens dans ce quartier lui semblent essentiels, au même titre que renforcer l’ancrage territorial de Paris 8 et la connaissance de l’Université par les habitants du quartier. « Ce lieu pourrait mettre en avant les talents des étudiants de l’Université » : concerts, expositions, débats, le Café à l’Asso pourrait prolonger la vie du campus en l’ouvrant sur l’extérieur.
La question du local dévolu à ce projet est cruciale. Les locaux commerciaux du quartier sont rares et tous ceux qui existent sont occupés. L’idéal pour Yanis serait de se voir attribuer un espace qui soit vraiment à l’articulation du campus et de l’extérieur. Il est en pourparlers avec l’Université pour essayer de s’implanter sur le campus. Une autre possibilité serait d’acheter un pavillon dans le quartier et d’en faire un tiers-lieu. Pour ce faire, une phase de recherche de financement, à travers une campagne de sociofinancement, et une recherche active de mécènes ont été lancées.
Pour mener à bien ce projet, Yanis a bénéficié de l’accompagnement de l’incubateur I-Engage, une expérience qui a véritablement permis de mettre son projet sur les rails. « On avait des experts, sur certains domaines pointus, notamment juridique, comptable ou de prévisionnel financier, qui nous ont accompagnés. » Une transmission de connaissances indispensable pour mûrir ce projet et anticiper toutes les étapes à venir pour le mener à bien. « Être avec des gens qui partagent notre intérêt pour l’entreprenariat social et solidaire, ça permet de se donner de la force », ajoute Yanis.
