Jocelyn Maixent, flash-back sur Cannes


Jocelyn Maixent, flash-back sur Cannes


Trônant sous le compagnonnage rassurant de deux de ses cinéastes favoris, les posters de Nuri Bilge Ceylan et de Lars Von Trier comme encadrant sa mine réjouie, Jocelyn Maixent reçoit dans son bureau, quasiment en habitué du festival de Cannes. Depuis 2012, cet enseignant de l’UFR Culture et communication accompagne chaque année un groupe d’étudiants de Paris 8 sur la croisette. Au programme, un maximum de films, et des rencontres avec des professionnels du cinéma. Retour sur un soixante-dixième anniversaire plus sécuritaire que spectaculaire.

Ce n’est pas la première fois que vous vous rendez à Cannes. Comment avez-vous vécu ce 70e festival ?


Il est vrai que m’y rends depuis plusieurs années, notamment parce je collabore à une revue d’entretiens, Tête à tête, qui s’intéresse, entre autres, au cinéma. Cette 70e édition était ma quinzième édition à titre personnel. L’idée de ce projet a émergé en 2012, concomitamment au thème choisi par l’université cette année-là : le cinéma. Les premières expériences ont été satisfaisantes. Cela nous a permis de rendre cette aventure pérenne.

Hormis les célébrations relatives au 70e anniversaire, avez-vous ressenti l’atmosphère particulière dont une partie de la presse s’est fait écho ?


Il est vrai que, du fait des risques d’attentats qui planent sur tous les événements d’ampleur, cette édition était hyper-sécurisée. C’est la première année que des snipers s’installent sur le toit du Palais des festivals. Heureusement, cette protection visible et omniprésente n’a pas perturbé la fluidité de l’organisation.

De quoi ce séjour était-il composé ?


L’idée est évidemment d’accréditer les étudiants pour leur permettre d’aller voir des films. Cette année, ils ont pu assister aux projections pendant les cinq derniers jours du festival. Les étudiants ont également rencontré des professionnels du cinéma, parmi lesquels Pierre Vavasseur du journal Le Parisien. Ces entrevues sont toutefois difficiles à mettre en place car, par définition, ces professionnels viennent à Cannes pour y travailler. Les étudiants ne se sont donc pas roulés les pouces : ils ont vu des films, écrit des critiques, travaillé sur le site Clap 8

Pouvez-vous nous parler des films les plus marquants que vous avez vus ? Qu’avez-vous pensé du palmarès ?


Incontestablement, comme tout le monde s’accorde à le dire, cette 70e édition a accouché d’une « petite année ». Ceci étant dit, au vu de l’offre, je ne trouve pas que le palmarès soit catastrophique, si on fait exception de la récompense accordée au film de Sofia Coppola. Trois films sont nettement sortis du lot : 120 battements par minute du français Robin Campillo, The Square, de Ruben Ostlund, la palme d’or – un film drôle sur un sujet grave, ce qui n’a à mon avis pas été assez souligné –, et Mise à mort du cerf sacré de Yorgos Lanthimos. Par ailleurs, du côté des sections parallèles, le cinéma français a proposé un visage séduisant. L’atelier, de Laurent Cantet, est un film remarquable qui évite les clichés dans lesquels il aurait pu s’empêtrer. Et Ava, de Léa Mysius – « petit film » d’une jeune femme de vingt-cinq ans issue de la Fémis –, est d’une maîtrise impressionnante malgré l’économie de moyens et la jeunesse de sa réalisatrice.

Qui sont vos cinéastes de prédilection ?


(Il se tourne vers les deux posters derrière lui en souriant.) J’adore le travail de Nuri Bilge Ceylan, cinéaste turc récompensé par une palme d’or pour Winter Sleep. La mise en image est unique, les procédés scénaristiques sont extrêmement subtils, les dialogues sont très travaillés… et c’est un artiste qui sait faire parler le silence. Sinon, je trouve très intéressant ce que propose Yorgos Lanthimos, dont j’ai adoré un des premiers films, Canine. C’est la dingue histoire du père d’une famille bourgeoise qui retient ses enfants en captivité de peur qu’ils se confrontent au monde extérieur. Afin de faire en sorte qu’ils ne puissent jamais se débrouiller seuls, sans lui, il a décidé de renommer le monde. C’est un film brillant sur l’ironie, le pouvoir, la dictature, le langage… Pour d’autres raisons, j’apprécie beaucoup Lars Von Trier. Melancholia est un film esthétiquement splendide ! 

Quel est votre meilleur souvenir à Cannes ?


Je garde forcément en mémoire la toute première fois que je m’y suis rendu avec les étudiants. La première fois reste dans tous les cas inoubliable. C’était en 2012, avant le « nouvel âge » du terrorisme que nous connaissons : nous avions accès à beaucoup plus d’événements. Cannes est désormais moins festif, et sans invitation on ne rentre nulle part. Le festival est devenu une chose sérieuse, verrouillée, tandis qu’auparavant on sentait davantage de folie.

Certains étudiants se sont-ils orientés vers le cinéma après Cannes ?


Beaucoup ! J’ai eu le grand plaisir de croiser certains d’entre eux dans le cadre de leur travail cette année à Cannes. Par exemple, une ancienne étudiante de L3 il y a deux ans est actuellement en poste chez un distributeur de films. Une autre étudiante ayant participé au premier voyage, en 2012, a collaboré par la suite directement avec le festival au service des accréditations, après un master de management des institutions culturelles et un stage chez Wild Bunch. Il est sûr que cette expérience, ce petit point de départ, peut éveiller des vocations, et confirmer ou infirmer des trajectoires.
 
Entretien réalisé par le service communication.

Trônant sous le compagnonnage rassurant de deux de ses cinéastes favoris, les posters de Nuri Bilge Ceylan et de Lars Von Trier comme encadrant sa mine réjouie, Jocelyn Maixent reçoit dans son bureau, quasiment en habitué du festival de Cannes. Depuis 2012, cet enseignant de l’UFR Culture et communication accompagne chaque année un groupe d’étudiants de Paris 8 sur la croisette. Au programme, un maximum de films, et des rencontres avec des professionnels du cinéma. Retour sur un soixante-dixième anniversaire plus sécuritaire que spectaculaire.

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